Recherche Bay numéro 100 - 08/03/2022
Pour le centième numéro de Recherche Bay, quelques changements éditoriaux concernant ce bulletin…
A partir de cette semaine, ma contribution sur l’actualité sur le marché de l’or est désormais directement disponible sur le site Or.fr.
Cette semaine, nous évoquons dans ce bulletin d’actualité sur l’or les conséquences du choc des prix sur les matières premières et les nouvelles stratégies des banques centrales par rapport aux conséquences de cette guerre.
Tout est détaillé cette semaine dans ce bulletin: Choc de prix sur les matières premières, les achats d'or physique s'accélèrent
Recherche Bay continue pour sa part dans un format éditorial réservé à l’actualité des compagnies minières.
L’impact de la hausse des matières premières s’accompagne cette semaine logiquement d’une hausse des minières mais l’effet reste pour le moment limité et très centré sur les productrices seniors.
Probablement que la hausse des cours du pétrole inquiète un secteur qui a déjà souffert l’an dernier de l’inflation. L’augmentation du prix des matières premières compresse les marges des minières, et cela se reflète sur les performances de l’ensemble du secteur.
Commençons notre lettre par l’analyse d’une minière que je ne possède pas dans mon portefeuille, qui est l’un des leaders du secteur: Rio Tinto, cotée à Londres sous le nom RIO.
Le titre RIO a entamé en Décembre une impulsion haussière engendrée par la figure harmonique “Bat”. Les deux cibles haussières ont été atteintes, la dernière cible ayant conduit à une forte vente sur fermeture du gap d’Aout 2021 sur divergence baissière.
Le croisement SMA50 / SMA 200 offre désormais un nouveau signal de support à la baisse. Techniquement, aucun volume à la hausse ne confirme une nouvelle impulsion haussière du titre. Les swing traders ont vendu, et ils ne sont pas remplacés pour le moment par de nouvelles vagues d’achats. Le Momentum court terme est terminé.
Cette analyse d’un des leaders du secteur confirme l’absence - pour le moment - d’investissement significatif dans le secteur des minières malgré les envolées des prix des matières premières.
La correction actuelle des marchés action et le contexte géopolitique incertain pèse sur le compartiment des minières.
Prenons l’exemple du secteur aurifère avec une valeur là aussi leader, Kinross, 5ème plus gros producteur mondial (que je n’ai pas en portefeuille). La compagnie minière possède 8 propriétés dans le monde, dont une pépite en Russie, Kupol, qui représente le quart de la production de la compagnie, et qui est de loin sa mine la plus rentable avec un AISC d’à peine $700 par once. Le cash flow généré par la mine lui permettait jusqu’à présent d’espérer aborder dans des conditions favorables son gros projet de développement minier de Lobo Marte, qui devait remplacer l’arrêt du projet chilien de Maricunga où la compagnie vient de perdre ses droits de forages aquifères. La menace de devoir ne plus compter sur ses ressources russes place la compagnie dans une situation extrêmement compliquée. Sans cette ressource russe, elle est même vulnérable et devra sans doute commencer à se séparer d’un ou plusieurs de ses actifs.
Le titre n’est pas vendu, les problèmes passés de la compagnie minière ont rendu KGC largement dévalué par rapport à ses pairs, et les actionnaires historiques attendent probablement plus de clarté dans l’avenir de Kupol. Mais la dévalorisation du titre retient considérablement les nouveaux entrants par rapport à la situation russe.
Cet exemple montre à quel point les troubles géopolitiques actuels pèsent sur le secteur métaux précieux. Les répercussions des embargos décidés ça et là peuvent à tout moment avoir des répercussions sur une juridiction. C’est un argument de plus qui refroidit les investisseurs potentiels.
Les investisseurs sur les minières aurifères ne semblent pas convaincus que la hausse de l’or est tenable. Il y a d’abord l’ensemble des fonds initiés qui savent que les commerciaux ne peuvent pas laisser l’or s’envoler et qui se préparent à une défense acharnée à ces niveaux. Quand on sait à l’avance qu’une banque commerciale va sortir l’artillerie lourde, on n’achète pas on vend plutôt les minières! Ces mouvements d’initiés ont permis par le passé de mesurer avec précision le bon timing de ces attaques (spoofing) des commerciaux. Une bonne analyse des algos de trading sur les minières laisse souvent entrevoir ce type d’actions dans les jours voire les heures à venir.
Mais il y a aussi une grande partie de ces investisseurs qui ont changé leur regard sur ce marché.
Le spectre d’une tension extrême retient aussi ces investisseurs: même si les sous-jacents ont le vent en poupe, les actions des sociétés minières sont aussi soumises à des contreparties (brokers, chambres de compensation) qui peuvent souffrir en cas de stress systémique. Ces actions peuvent souffrir d’appels de marges dans le cas de faillites en cascade d’institutions. Cette peur du scénario extrême privilégie comme en 2008 les investisseurs vers l’or physique au profit des minières, alors que les conditions en termes de liquidité sont bien différentes, et que les valorisations de ces sociétés sont bien plus basses par rapport aux métaux que lors de la dernière crise financière.
L’analyste Marin Katusa rappelle que l’index des valeurs liées aux matières premières est à un niveau historiquement bas par rapport au SP500.
Mais l’image est encore plus impressionnante lorsque l’on compare l’indice GDX des minières Or avec le SPX:
L’or atteint des plus hauts historiques mais les minières restent largement sous évaluées, non seulement par rapport à l’or lui-même, mais aussi par rapport au reste du marché.
Deux exceptions notables dans cette sous-performance relative:
Ce phénomène ne concerne pas les royalties qui signent des plus hauts historiques cette semaine. Et cela ne concerne pas non plus la minière Or leader, à savoir Newmont, qui signe elle aussi un plus haut historique cette semaine.
Comment ajuster notre stratégie de gestion de portefeuille par rapport à ces éléments?
Ce phénomène de sous-performance des minières par rapport aux métaux concerne aussi le secteur des métaux industriels.
Sur le marché de l’Etain par exemple, je reste très surpris de la sous-performance relative des rares compagnies minières du secteur.