Recherche Bay numéro 272 - 25-06-2025
La dédollarisation s’accélère!
La nouvelle est passée inaperçue…
La Chine promeut l’usage de l’or comme alternative stratégique. En inaugurant une plateforme de livraison à Hong Kong via la Shanghai Gold Exchange, elle facilite les règlements en yuan adossés à de l’or physique.
Ce geste n’est pas anodin. Il s’inscrit dans une stratégie de long terme visant à affirmer le yuan comme monnaie de règlement international, tout en offrant aux partenaires commerciaux de Pékin une forme de garantie tangible : l’accès à de l’or physique livré hors de Chine continentale.
En ouvrant cette plateforme logistique à Hong Kong, la Shanghai Gold Exchange (SGE) permet pour la première fois à des investisseurs et institutions étrangères d’acquérir de l’or coté en yuan, puis d’en prendre livraison effective dans un lieu reconnu pour sa transparence financière. C’est une étape décisive dans l’internationalisation du yuan, mais aussi dans la mise en place d’un modèle monétaire alternatif au système dominé par le dollar et les bons du Trésor américains.
La Chine crée ainsi un pont entre sa monnaie et une valeur universelle : l’or. Ce couplage renforce la confiance dans le yuan en dehors de ses frontières, notamment auprès de pays partenaires qui hésitent à accumuler des dollars ou de la dette américaine dans un contexte de tensions géopolitiques. Il permet aussi d’attirer des flux de capitaux dans un cadre sécurisé, avec une livraison effective de métal, exonérée jusqu’à fin 2025 de frais d’entreposage et de sortie.
Autrement dit, Pékin ne se contente plus de diversifier ses réserves : elle structure une véritable alternative au dollar, adossée à un actif réel. Un pas de plus vers un ordre monétaire multipolaire.
La Chine favorise désormais le yuan dans ses échanges (52 % contre 43 % pour le dollar) et réduit ses avoirs en bons du Trésor (757 Mds $ contre 1 300 Mds $ à son pic).
L’or devient ainsi un levier monétaire, à la fois réserve de valeur, outil géopolitique et mécanisme de règlement hors dollar. Ce repositionnement monétaire chinois reflète une volonté claire : s’affranchir du système occidental et proposer une alternative crédible au modèle centré sur le dollar.
Avant de revenir en détail dans ce bulletin sur les marchés des métaux précieux, je souhaite attirer l’attention sur trois éléments majeurs observés cette semaine.
Le premier concerne l’uranium : l’ETF URA vient d’enchaîner douze semaines consécutives de hausse, un mouvement haussier remarquable qui témoigne d’un engouement structurel pour le secteur.
Dans ce contexte, Cameco, l’un des leaders mondiaux de l’uranium, a atteint un nouveau sommet historique cette semaine. Le titre a doublé en quelques semaines, propulsant sa capitalisation boursière de 20 milliards de dollars supplémentaires. Depuis son point bas en 2020, l’action a été multipliée par 12, illustrant la transformation spectaculaire de ce marché autrefois négligé.
Le titre Anfield Energy, que j’avais présenté dans mon dernier bulletin spécial écrit depuis New York, a gagné plus de 40 % en seulement quelques séances
.
Le deuxième point marquant de la semaine concerne le net regain d’intérêt pour les sociétés d’exploration, longtemps délaissées au profit des producteurs établis. Deux exemples très révélateurs ont marqué ces derniers jours :
• Awalé Resources a bondi de plus de 20 % après l’annonce de résultats de forage très prometteurs sur son projet aurifère en Côte d’Ivoire. Ce rebond spectaculaire intervient à peine quelques semaines après que Fortuna Mining a pris une participation stratégique de 15 % dans la junior — un timing impeccable, qui conforte l’idée que certaines majors commencent à sécuriser des relais de croissance en amont de la chaîne. Les forages récents à Odienné confirment un système minéralisé de grande ampleur, ce qui pourrait repositionner Awalé comme une cible d’intérêt régional, voire stratégique.
• Onyx Gold est l’autre dossier qui a enflammé les carnets d’ordres après la publication de résultats de forage « somptueux », selon les mots d’un analyste. La société, qui explore au Mali et en Guinée, a identifié des intervalles à haute teneur qui dépassent les standards des précédents cycles haussiers. Là aussi, le marché a immédiatement réagi, preuve que les capitaux se repositionnent de manière sélective sur des profils juniors à fort levier géologique. Le titre a doublé en à peine huit séances!
Ce retour d’appétit sur les juniors est d’autant plus significatif qu’il tranche avec l’atonie observée ces derniers mois : il y a encore peu, des résultats similaires auraient à peine suscité quelques volumes de trading. Désormais, on observe une rotation progressive : les investisseurs, après avoir pris des bénéfices sur les producteurs matures, semblent commencer à se repositionner en amont, sur les sociétés d’exploration à fort potentiel.
Cette dynamique suggère une bascule psychologique : les flux se réorientent vers la prise de risque, un signal typique des phases intermédiaires d’un cycle haussier sectoriel.
Toujours dans le segment des juniors, Amerigo Resources se distingue comme l’une des rares sociétés à avoir survécu au long bear market du secteur. Après avoir connu un effondrement brutal à partir de 2009, l’entreprise avait entamé une longue traversée du désert. Mais ces dernières semaines, le titre est revenu au contact de ses plus hauts niveaux, porté par une combinaison de fondamentaux solides, d'une remontée des prix du cuivre et d’un regain d’intérêt pour les profils juniors résilients. Amerigo, qui traite les rejets miniers de la grande mine chilienne El Teniente (Codelco), a su maintenir sa production tout en réduisant ses coûts – un modèle défensif qui attire de nouveau les investisseurs dans ce contexte incertain.
Le troisième élément marquant cette semaine concerne un métal qui suscite un intérêt croissant : le cuivre.
Après un puissant mouvement haussier amorcé en mars et annoncé dans ces bulletins, le cuivre vient d’enregistrer un record historique de clôture hebdomadaire, confirmant ainsi le breakout technique franchi début juin. Ce signal haussier intervient dans un contexte de tensions persistantes sur l’offre, accentuées par les difficultés structurelles de certains producteurs majeurs (comme au Panama, au Pérou ou en Mongolie), et alors que la demande reste portée par la transition énergétique, les véhicules électriques et les infrastructures numériques.
À Wall Street, le sentiment change rapidement : le cuivre n’est plus seulement perçu comme un baromètre cyclique, mais comme un actif stratégique dans un monde en mutation industrielle et géopolitique. Plusieurs hedge funds ont d’ailleurs renforcé leurs positions longues ces dernières semaines, misant sur une revalorisation structurelle du métal rouge.
Ce mouvement bénéficie également aux titres cotés du secteur, en particulier ceux exposés à des projets avancés ou à faible coût.
Très belles progressions des titres cuivre évoqués en Février après la conférence que j’ai organisé sur les métaux de la transition à l’ambassade d’Argentine.
Marimaca Copper a doublé depuis son creux d’Avril
Aldebaran s’est envolé ces deux dernières semaines sur des volumes historiques
Midnight sun semble profiter cette semaine d’un retour sur les juniors qui est en train aussi d’affecter le secteur Cuivre.
Poursuivons ce bulletin en tournant désormais notre attention vers les marchés de l’or et de l’argent, afin d’y dégager une stratégie pertinente pour les mois d’été.
Un été qui, contrairement à son calme habituel, pourrait bien offrir plusieurs fenêtres d’action pour les investisseurs avisés, notamment sur le marché de l’argent, dont la dynamique actuelle suggère un potentiel de mouvements marqués. Entre volatilité structurelle, anomalies de marché, et signaux techniques majeurs, le métal argenté pourrait redevenir le théâtre principal d’initiatives tactiques pour ceux qui sauront en saisir le rythme.